Après la multiplication des pains, dans le récit de saint Jean (Jn 6, 1-15), la foule veut enlever Jésus « pour le faire roi », sans doute parce qu’elle a été nourrie par Lui. Jésus fuit et se retire, seul, dans la montagne. Lorsqu’il entrera à Jérusalem pour y vivre sa Passion, les disciples l’acclameront comme roi. La foule, elle, recourra au psaume 118 pour saluer « le roi d’Israël » (Jn 12, 13). Or, paradoxe à vue humaine, comment ce roi entrera-t-il à Jérusalem ? Humblement, monté sur un ânon.
Ces scènes de l’Evangile montrent que Jésus répugne à être roi au sens où, de prime abord, nous pourrions le comprendre. Son désir n’est pas de jouir du pouvoir temporel, de détenir la puissance publique. Mais ce n’est pas la royauté elle-même qu’il refuse. Il est vraiment roi. A la question de Pilate, « alors, tu es roi ? », il répondra : « C’est toi-même qui dis que je suis roi » (Jn 18, 37), non sans avoir préalablement précisé que son royaume « n’est pas de ce monde » (Jn 18, 36).
Alors comment Jésus est-il roi ? Il est venu pour « servir et donner sa vie » (Mc 15, 26). Au soir du Jeudi saint, lorsqu’il lave les pieds de ses disciples, il dit : « vous m’appelez le Maître et le Seigneur et vous dîtes bien, car je le suis » (Jn 13, 13). Il ne renonce pas à l’exercice de la royauté, mais c’est dans le service qu’Il l’exerce et qu’il la manifeste. Et ce service est profondément enraciné dans l’eucharistie. L’acte eucharistique de Jésus est LE service par excellence, non seulement l’offrande faite à un instant donné de l’histoire, mais aussi le don sans cesse renouvelé, actualisé, pour tous les hommes et tout au long de l’histoire. Nous pouvons y penser à chaque messe : Jésus, sur l’autel, jour après jour, est ce Roi serviteur de tous les hommes qu’il veut conduire au salut.
Père Emmanuel Tois