« Seigneur, lorsque mon frère commettra des fautes contre moi, combien de fois dois-je lui pardonner ? (Mt 18, 21) » La question que Pierre pose dans l’Evangile de ce dimanche fait suite aux recommandations de Jésus que nous avons méditées dimanche dernier : « Si ton frère a commis un péché contre toi, va lui faire des reproches seul à seul. S’il t’écoute, tu as gagné ton frère. S’il ne t’écoute pas, prends en plus avec toi une ou deux personnes afin que toute l’affaire soit réglée sur la parole de deux ou trois témoins » (Mt 18, 15-17). Trois démarches proposées par Jésus. Et logiquement, Pierre s’interroge : si la triple initiative échoue, que faire ? En homme de bien, il fait une belle proposition à Jésus : « combien de fois dois-je lui pardonner ? Jusqu’à sept fois ? ». La proposition est généreuse, car selon la symbolique biblique, sept est le chiffre de la perfection terrestre. « Jusqu’à sept fois » revient à dire : « Toujours et parfaitement ». Au demeurant, le chiffre « 7 » parlait au Juif qu’est Pierre :« Si quelqu’un tue Caïn, Caïn sera vengé sept fois. », avait dit Dieu dans les temps anciens (Ex 4, 15), montrant Sa miséricorde à Caïn le pécheur.

Pourtant, le Christ fait exploser les plafonds. Il pulvérise toute idée de vengeance, il rejette même avec force toute forme de comptabilité dans le pardon : « soixante-dix fois sept fois » (Mt 18, 22). Le pardon, le pardon, toujours le pardon. Inlassablement. Et si nous avons tant de difficulté à mettre en œuvre cette surabondance du pardon dans nos vies blessées, nous sommes pourtant bénéficiaires de cette surabondance dans le pardon que Dieu nous donne. Imagine-t-on qu’à la huitième, la centième ou la dix millième fois que je confesse un péché d’habitude, Dieu me réponde, par la bouche du prêtre : « c’est fini, je ne te pardonne plus » ? Ne sais-je pas, n’ai-je pas expérimenté que encore et toujours, chute après chute, Dieu me fait confiance et me relève ?

Alors, pour suivre Jésus qui nous invite à cette surabondance de pardon, demandons-Lui de convertir nos cœurs : nous aussi, dans le concret de nos vies, nous sommes invités à pardonner. Sans limite, mais pas sans aide : la Sienne.

Père Emmanuel Tois