Cette citation tirée de l’évangile de ce dimanche (Luc 14, 11) trouve une illustration singulière dans une exposition que l’on peut voir aux musées de Chantilly. Les enluminures d’un livre de prière, Les très riches heures du duc de Berry sont exposées à l’occasion de leur restauration.

Le titre indique l’élévation et la richesse de ce grand mécène de la fin du Moyen-Age. La préciosité des matériaux, la qualité des peintures le confirment : ce sont de très riches heures. Jean de Berry, fut puissant, riche et très conscient de sa supériorité. Les nombreux livres de prière manuscrits et enluminés qu’il a fait réaliser illustrent sa dévotion, mais davantage encore son prestige.

Cependant, le calendrier liturgique qui introduit les très riches heures, est accompagné d’enluminures figurant les douze mois. Au second plan un château ou une cité illustre l’autorité du duc sur ses domaines et le royaume. Au premier plan une scène de la vie quotidienne illustre les activités caractéristiques de cette période de l’année. S’il y a quelques scènes de cour, le plus nombreuses sont tirées de la vie paysanne.

En ouverture de ce livre de prière, c’est la rudesse du travail qui nous est présentée : après la rigueur du froid de l’hiver qui ralentit le travail, se déploie la succession monotone et rigoureuse des labours, des fenaisons, de la moisson, de la tonte des moutons, des vendanges, des semailles et de la glandée. Les corps sont courbés accroupis ou dressés, rarement en repos. Le froid ou la chaleur sont perceptibles.

Probablement malgré lui, le duc de Berry a élevé l’humble travail quotidien et répétitif au rang de chef d’œuvre, alors que la plupart de ses nombreux châteaux et palais, signes de sa puissance n’existent plus aujourd’hui : « Qui s’élève sera abaissé, qui s’abaisse sera élevé. »

P. Vincent THIALLIER