– 48 personnes sensibilisées à la question des abus sexuels, ce n’est pas beaucoup, laissa échapper le curé un peu désabusé. J’espérais plus de monde à cette première soirée.
– Tu sais, c’est difficile de rassembler les gens sur un sujet pareil, répondit l’un de ses confrères.
– Enfin, quand même, à l’appel du pape ! Tu as lu comme moi, il se mouille, il dit que si on veut se débarrasser d’un mal aussi profond, il faut que tous les baptisés s’emparent de la question. Là, il y avait surtout des gens déjà convaincus. Non, vraiment, je n’ai pas su présenter notre démarche.
– Je crois qu’il y a des gens qui ont eu peur qu’on fasse le procès de l’Eglise, dit un autre.
– Pfff … C’est vraiment que j’ai mal expliqué les choses ! C’est parce qu’on l’aime, l’Eglise, c’est parce qu’elle a été fondée par Jésus et qu’elle est sainte qu’on voudrait que plus jamais, en son sein, Il n’y ait ni abus sexuel, ni abus de pouvoir, ni abus de conscience.
– Moi je pense que les gens commencent à être informés. C’est pour cela que tu n’as pas eu grand monde. Depuis deux ou trois ans, les choses ont changé, désormais on parle, et beaucoup plus profondément, de ces drames.
– Peut-être, dit le curé, à peine rasséréné.
– Pardon, je ne vous espionne pas, mais je viens au secrétariat et je vous ai entendus. Moi, je ne suis pas venue, car l’un de mes proches a été victime d’abus sexuel, et pour moi, c’est encore trop difficile d’entendre parler de cela.
– Bien sûr, répondit le curé . Pardon si tout cela vous a blessée. Merci de votre parole. Elle m’aide à me souvenir que nos expériences personnelles sont déterminantes pour nous positionner sur ce grave sujet.
Emmanuel Tois +